La Société des Bauxites de Guinée (SBG) est en pleine tourmente. Une grève d’une ampleur inédite paralyse l’entreprise, plongeant ses travailleurs dans une situation de plus en plus précaire. À l’origine du mouvement : des arriérés de salaires de neuf à douze mois, une gestion opaque et des conditions de vie détériorées sur le site minier.
Une production interrompue pendant plus de deux ans
La crise actuelle trouve ses racines dans une paralysie prolongée de l’exploitation. La société a continué à accumuler des arriérés de salaires pour des travailleurs qui, techniquement, sont en situation de chômage. En effet, la mine n’a plus produit depuis juillet 2022, laissant des centaines d’employés sans activité réelle mais toujours sous contrat. Ce n’est qu’au début du mois de janvier 2025 que la production a timidement repris, sans toutefois apporter de garanties quant au règlement des salaires impayés. Cette longue période d’inactivité a exacerbé les tensions sociales et économiques, poussant les employés à bout.
Une mobilisation historique : les directeurs en première ligne
Fait exceptionnel dans le secteur minier guinéen, ce sont les directeurs eux-mêmes qui ont lancé un appel au débrayage, une première dans l’histoire de l’industrie minière du pays. Face aux retards de paiement et à l’absence de solutions concrètes, ces cadres, pourtant habituellement garants du bon fonctionnement de l’entreprise, ont pris l’initiative de se joindre à la contestation, signe du niveau critique atteint par la crise.
Les paiements des salaires se font de manière aléatoire : ceux ayant plusieurs mois d’arriérés ne reçoivent qu’une fraction de leur dû, instaurant une forme de « tontine » qui attise les tensions.
Une situation de vie intenable
Outre les salaires impayés, les conditions de vie sur le site se sont dramatiquement dégradées. Depuis plusieurs jours, l’eau et l’électricité ont été coupées faute de règlement des factures. Hier encore, alors qu’une tentative de rétablissement du courant était en cours, l’électricité et l’eau sont restées hors service, privant les travailleurs des ressources essentielles à leur survie. Sans électricité, les forages ne fonctionnent plus, empêchant tout accès à l’eau potable.
Gestion douteuse et soupçons de fraude fiscale
Les difficultés actuelles de la SBG ne sont pas seulement liées à un manque de liquidités, mais aussi à une gestion financière trouble. Lors du rachat de la société par Nabé, des accusations de fraude fiscale ont émergé, sans qu’aucune mesure corrective ne soit mise en place.
Par ailleurs, l’entreprise est impliquée dans des transactions douteuses, comme celle avec Elite Mining, où un contrat de 200 000 tonnes de bauxite n’a abouti qu’à une livraison symbolique, laissant planer le doute sur la transparence des opérations. Actuellement, des manœuvres seraient en cours pour signer un nouvel accord avec une société chinoise, renforçant les inquiétudes sur une éventuelle dilapidation des ressources minières guinéennes.
Des ennuis judiciaires pour Fisher et ses complices
En parallèle, plusieurs hauts responsables de la SBG, dont Fisher et ses associés, font face à des poursuites judiciaires. Certains actionnaires minoritaires ont déjà obtenu gain de cause devant les tribunaux, mais malgré cela, les détournements et irrégularités persistent.
Alors que la grève se durcit et que les travailleurs continuent d’exiger leur dû, la SBG s’enfonce dans une crise qui va bien au-delà des salaires impayés. Ce mouvement historique, marqué par la révolte des directeurs eux-mêmes, révèle un profond malaise au sein de l’entreprise et pose la question de l’avenir de l’exploitation bauxitique en Guinée.
Les modifications permettent d’intégrer la reprise tardive de la production et ses conséquences sur la crise actuelle, renforçant ainsi l’analyse de la situation.