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Chaque année, au moins 20.000 personnes perdent la vie par noyade dans la Région européenne, alors que ces décès pourraient être évités, a alerté lundi l’Agence sanitaire mondiale de l’ONU, à la veille de la Journée mondiale de la prévention des noyades (25 juillet).
Selon la branche européenne de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), cela peut sembler une petite fraction du fardeau mondial total, mais il s’agit tout de même de la deuxième cause de décès chez les enfants âgés de 5 à 14 ans.
« La plupart d’entre nous pensent rarement, voire jamais, à la noyade comme à un risque de santé publique ayant un impact significatif », a déclaré dans un communiqué, le Dr Hans Henri P. Kluge, Directeur régional de l’OMS pour l’Europe.
La plupart d’entre nous pensent rarement, voire jamais, à la noyade comme à un risque de santé publique ayant un impact significatif
Mais le récent chavirement de l’Adriana dans les eaux entre la Grèce et l’Italie, un minuscule bateau de pêche rempli de centaines de personnes à la recherche d’une nouvelle vie en Europe, a changé la donne. Dans cette seule catastrophe, plus de 600 personnes, blotties dans le désespoir, se sont noyées ensemble ; la plupart des corps ne seront jamais retrouvés.
Plus de 236.000 personnes se noient chaque année
Cependant, il est beaucoup plus fréquent que des hommes, des femmes et des enfants se noient seuls et en silence dans toute une série de situations — en sautant sans surveillance dans une piscine d’arrière-cour non clôturée, pris dans le courant d’une plage dont les compétences en natation ne suffisent pas à les libérer ou en faisant de la voile ou du paddleboard sans la protection d’un gilet de sauvetage.
« Tomber dans l’eau en rentrant seul chez soi. Les variations sont infinies », a ajouté le Dr Kluge.
Au niveau mondial, l’OMS estime qu’au moins 236.000 personnes perdent la vie chaque année à cause de la noyade.
« Je dis [au moins] car ces chiffres représentent des noyades involontaires. En raison de la nature de la classification, les noyades liées au transport maritime, aux catastrophes environnementales, à l’automutilation ou à l’agression ne sont pas incluses ici », a fait valoir le Dr Kluge.
Selon l’Agence onusienne, cette classification sous-estime en fait le fardeau mondial de la noyade de 30 à 50%.
En Europe, la noyade est également une question cruciale d’équité, les taux de mortalité variant de 20 fois dans les 53 pays de la région, les pays de l’est affichant généralement les taux les plus élevés.
Mortalité très élevée chez les hommes de 30 à 49 ans
Par exemple, si l’on considère le véritable fardeau de la noyade au Royaume-Uni, où toutes les causes de noyade sont comptabilisées, il est en fait 165% plus élevé que la portée limitée estimée par l’OMS, les décès par noyade dus à l’automutilation intentionnelle étant particulièrement préoccupants et constituant une priorité nationale croissante en tant que crise à laquelle il convient de s’attaquer.
L’épidémiologie des noyades dans la Région européenne de l’OMS est également très différente de celle du reste du monde. La mortalité par noyade chez les hommes de 30 à 49 ans est la plus élevée des six Régions de l’OMS. Cela s’explique par le fait que la noyade est davantage associée aux loisirs aquatiques qu’à la survie.
En outre, les décès signalés ne représentant que la partie émergée de l’iceberg, la noyade est également à l’origine d’un large éventail de lésions non mortelles ayant des répercussions importantes sur la santé, allant des troubles respiratoires dus à l’inhalation d’eau aux lésions cérébrales hypoxiques, qui ont des conséquences à vie.
L’Europe est également la région de l’OMS où la consommation d’alcool par habitant est la plus élevée. L’alcool est ainsi associé à 26% de l’ensemble des décès par noyade dans la Région européenne, la proportion allant de 3% à plus de 55% dans les différents pays européens, selon l’OMS.
Noyades de migrants et réfugiés
Enfin, il y a la crise migratoire et ses liens avec la noyade, comme le souligne la récente tragédie méditerranéenne. Selon le projet « Missing Migrants » de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), environ 34.000 personnes se sont noyées au cours de leur migration depuis que les données ont commencé à être collectées en 2014.
Cela représente 60% de tous les décès liés à la migration enregistrés, et près de quatre sur cinq (76%) d’entre eux se sont produits en Méditerranée et dans la Manche, toutes deux situées dans la région européenne de l’OMS.
A noter qu’en mai dernier, l’Assemblée mondiale de la santé, à l’instar de l’Assemblée générale des Nations unies en 2021, a adopté une résolution historique sur la prévention des noyades, défendue par 72 pays, dont 42 des 53 pays de la région européenne.
Mais pour l’OMS, la grande question est de savoir ce que cette résolution signifie réellement pour des pays aussi différents que l’Irlande, une île qui compte plus de 3.000 kilomètres de côtes, et le Turkménistan, dont 70% du territoire est désertique.
« Comment les États membres de l’OMS vont-ils prendre des mesures concrètes sur une question qui nécessite beaucoup plus d’attention qu’on ne l’a vu jusqu’à présent ? », s’interroge le Dr Kluge